Le Bubishi (武備志), souvent qualifié de « Bible du karaté » par le maître Chojun Miyagi, est un manuscrit ancien compilé au XVIIe siècle en Chine (sous le titre Wubei Zhi de Mao Yuanyi) et adapté au XIXe siècle à Okinawa. Il regroupe des enseignements sur la philosophie martiale, la stratégie, la médecine chinoise et, surtout, des techniques de combat issues des styles Grue Blanche (Bai He Quan) et Poing du Moine (Shaolin). Parmi ses 32 articles (selon les versions les plus complètes), l'article 29 décrit les 48 techniques de self-défense (ou « 48 figures de combat rapproché »), illustrées par des croquis schématiques montrant des scénarios de lutte à deux personnes. Ces techniques, codifiées sous forme de diagrammes poétiques et symboliques, visent à reconstituer un système de Quan Fa (poing chinois) adapté au Ti (Tode, ancêtre du karaté). Elles ne sont pas numérotées explicitement dans toutes les copies manuscrites (transmises oralement de maître à élève), mais les interprétations modernes, basées sur les lignées Goju-ryu, Shorin-ryu et des analyses comme celles de Patrick McCarthy ou Milos Stanic, les séquentent logiquement.
La technique n°5 fait partie de cette série et est souvent référencée comme une manipulation de la tête (head manipulation) pour un takedown ou une projection. Elle correspond approximativement à la figure n°4 dans la séquence des 48 (selon l'analyse de Stanic dans Okinawan Bubishi), qui est une variante de contrôle cervical menant à une chute. Ce n'est pas une frappe isolée, mais une séquence intégrée au combat rapproché, influencée par le jujutsu chinois et les bunkai (applications) des katas okinawaïens anciens. Pour les experts, cette technique illustre les principes fondamentaux du Bubishi : l'union du dur et du souple (goju), l'exploitation des points vitaux (kyusho) et l'ajustement de la distance (maai). Elle met l'accent sur l'efficacité pragmatique plutôt que sur l'esthétique, et s'inscrit dans une logique de neutralisation rapide d'un adversaire armé ou non.
Nom et symbolisme
Nom traditionnel : Pas de nom unique en chinois/okinawaïen dans le Bubishi (les titres sont poétiques, e.g., « Le dragon émerge de l'abîme » pour des séquences similaires). Dans les interprétations modernes :
Milos Stanic : « Head manipulation technique » (technique de manipulation de la tête).
Patrick McCarthy (Bubishi: The Classic Manual of Combat) : Référencée comme une « saisie cervicale avec projection » (cervical seize and throw), liée à la figure 4 des 48.
Gichin Funakoshi (dans Karate-Do Kyohan) : Variante appelée « kubiwa » (collier autour du cou) ou « kubi shime » (étranglement cervical), avec des échos dans les bunkai de Naihanchi.
Symbolisme : Inspirée du style Tigre (force brute pour la saisie) et Grue (précision pour le contrôle). Elle évoque le principe « Ne pas hésiter quand le combat commence : agis avec sérieux » (tiré de l'article 3 du Bubishi).
Description détaillée de la technique
La figure schématique du Bubishi montre un adversaire (uchi) attaquant avec un coup de poing droit (tsuki) ou une saisie frontale, tandis que le défenseur (uke) contre par une saisie de la tête menant à une torsion et une chute. Voici une décomposition pas à pas, adaptée pour un entraînement expert (utilisez des protections et un partenaire consentant ; cette technique est potentiellement létale en contexte réel).
Position initiale et entrée (irimi) :
Uke : En garde naturelle (fudō dachi ou sanchin dachi pour ancrage), mains en position de blocage circulaire (kakate), à une distance maai courte (environ 1 m).
Uchi attaque : Coup droit au visage ou saisie de lapel/col (kakate tsuki ou tsukami).
Principe : Ajustez la distance en pivotant légèrement sur le pied avant (asahi sabaki) pour éviter le centre ligne. Inspirez profondément (ibuki) pour charger le tanden (centre abdominal) et unir le go (dur) et ju (souple).
Blocage et saisie (uke et tsukami) :
Bloquez l'attaque avec l'avant-bras (gedan barai ou age uke) en spirale, redirigeant l'énergie de l'adversaire (ju no ri, principe souple).
Saisissez simultanément l'arrière de la tête de l'uchi avec la main avant (ou les deux mains en crochet crane-like) : doigts enfoncés dans la nuque/base du crâne (ciblant le point vital GB-20, Fengchi – intersection des méridiens Vésicule Biliaire et Vaisseau Gouverneur, provoquant désorientation et perte d'équilibre).
Variante pour expert : Si l'attaque est une saisie, contre-saisissez le poignet de l'uchi avec la main arrière pour un lock (kote gaeshi préliminaire), puis transitez vers la tête.
Manipulation et torsion (henka et kubi mawashi) :
Tirez la tête vers le bas et vers votre centre (shomen uchi ou mawashi geri potentiel si besoin), en tournant votre hanche (koshi) pour appliquer une torsion cervicale (neck crank). Cela exploite la vulnérabilité structurelle du cou (axe C1-C7) et perturbe l'équilibre via le sinus carotidien (ST-9, Renying – point vital n°9 des 36 kyusho du Bubishi, causant hypotension et nausée).
Ajoutez une frappe accessoire : Coude (hiji ate) au plexus (CV-17, Tanzhong) ou genou (hiza geri) aux testicules pour amplifier la douleur.
Principe expert : Utilisez le poids corporel (taijutsu) plutôt que la force brute ; synchronisez avec l'exhalation (nogare) pour maximiser l'impact interne (kihon no atemi).
Projection et finition (nage et zanshin) :
Projetez l'uchi au sol par un pivot (osoto gari ou uchi mata variant) : Poussez la tête vers le bas tout en balayant la jambe extérieure de l'uchi avec votre pied avant.
Une fois au sol : Poursuivez avec un stomp (gedan geri) au sternum ou un ground-and-pound (tetsui uchi, coup de marteau) au visage, ou un étranglement (kesa gatame).
Zanshin : Restez en garde, scannez l'environnement pour d'éventuels renforts (principe de l'article 16 du Bubishi sur les échappées).
Durée estimée : 2-3 secondes en exécution fluide. Risques : Blessure cervicale grave (fracture, lésion médullaire) ; testez toujours en slow motion.
Applications et liens avec les katas
Bunkai directs :
Passai (Dai/Sho) : Séquence d'ouverture (blocus + saisie tête + takedown), similaire à la description du Bubishi.
Kushanku (Kanku) : Variante avec ura kamae (position cachée) pour la saisie surprise.
Naihanchi : Contrôle latéral de la tête en combat rapproché.
Adaptations modernes : Dans le Koryu Uchinadi (Patrick McCarthy), c'est une défense contre saisie lapel ; en MMA, cela ressemble à un clinch takedown (e.g., dirty boxing neck crank).
Points vitaux impliqués (des 36 kyusho du Bubishi, article 28) :
GB-20 (nuque) : Déséquilibre et vertiges.
ST-9 (carotide) : Choc vagal (ralentissement cardiaque).
Effet cumulatif : Incapacitation en 5-10 secondes sans frappe létale.
Principes avancés pour experts
Stratégie (sen no sen/ go no sen) : Anticipez l'attaque en lisant les hanches (koshi no ki) ; passez en mode go (dur) pour la saisie, ju (souple) pour la redirection.
Entraînement :
Solo : Drill de saisie tête en mirage (imaginer l'adversaire) avec focus sur le tanden.
Partner : 50 reps lents, puis randori (combat libre) à 50% intensité. Intégrez des drills de vital points avec des protections (focus mitts pour coude).
Erreurs courantes : Sur-force (raideur) ; négliger le zanshin (exposition post-projection).
Contexte historique : Cette technique reflète les combats de rue okinawaïens du XIXe siècle (contre samouraïs ou brigands), où les armes étaient bannies. Elle n'est pas « mystique » mais pragmatique : 70% des 48 techniques du Bubishi sont des grapplings, prouvant que le karaté ancien était un art mixte (striking + clinch).
Pour une étude approfondie, consultez Bubishi: The Classic Manual of Combat de Patrick McCarthy (2016, édition annotée) ou les analyses de Milos Stanic (Okinawan Bubishi). Entraînez avec un sensei qualifié – ces techniques exigent maturité et éthique (bushido du Bubishi : « La victoire sans honneur est une défaite »). Si vous avez une version spécifique du Bubishi, des nuances peuvent varier.

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